dimanche 16 janvier 2011

La réalisation d'un rêve

Certes un rêve de beignet, c'est un rêve, pas un beignet. 
Mais un rêve de voyage c'est déjà un voyage.
                                                                 Marek Halter

Un matin nous nous sommes regardés, et nous avons pensé ensemble (oui, ça arrive souvent aux vieux couples):
 " Il serait temps que nous fassions un beau voyage" Ce n'est pas le privilège d'Ulysse.
Il n'a pas fallu attendre la fin de la journée pour trouver une destination.

Ce sera Cuba !

Le rêve a commencé, le voyage aussi.

       Nous commençons à en parler entre nous d'abord puis à certains proches. Cela donne de la consistance à l'imaginaire. Dans les librairies nous nous arrêtons au rayon voyage. Nous feuilletons nous achetons aussi l'un ou l'autre ouvrage qui nous paraît utile comme le Routard.
Elyane se documente, fait des recherches sur internet, cherche des témoignages. Moi je me décide à étudier les rudiments d'Espagnol.
Nous aimerions sortir des clichés touristiques, des hôtels de luxe qui se ressemblent dans tous les coins du monde.

  Renseignements pris il semble assez difficile de loger chez l'habitant. Nous optons donc pour un compromis . Nous louerons une voiture pour être indépendants et nous logerons dans des hôtels moins luxueux.

Pour nous aider à trouver la meilleure formule nous nous adressons à Nouvelles Frontières.

Premier long-courrier depuis  une quarantaine d'années. Nous sommes un peu comme des néophytes et nous acceptons sans trop discuter les propositions de l'agence et ses arguments ! Nous verrons sur place si nous avons eu raison.






Cuba, oh Cuba!

      Je fais l'impasse sur le reste des préparatifs. Achat des passeports, de la carte touristique, des vaccins et autres courses.
     Merci en passant à ceux qui nous ont prêté des valises, celles que nous avons utilisées et celles qui sont restées dans le garage.
    Enfin le jour du départ ! Chris et les petites nous déposent à la gare du midi avant d'aller à l'école. Gros bisous, bon voyage, revenez avec plein de souvenirs, on pensera à vous .... et voilà, un dernier signe de la main, on regarde la voiture s'éloigner et on se tourne vers cet avenir tant attendu et maintenant si proche.
Première étape


Jusque là tout va bien. Air France nous a permis de voyager dans le TGV en première classe (agréable surprise). Là où nous déchantons c'est lorsque nous prenons nos place dans l'avion! Les sièges sont prévus pour des culs-de-jatte et pas trop larges de carrure... En se contorsionnant bien on arrive à se glisser à nos places. L'idée de passer dix heures de vol dans cet espace restreint nous donne des sueurs.  Pas question de faire marche arrière alors nous cherchons la position la moins inconfortable et à Dieu va!

Après une attente assez pénible au passage des services d'immigration. Récupération des bagages et premier contact avec l'ambiance cubaine. Je me dirige vers un guichet de change et ne voyant pas de file je me prépare mes billets. Je me fais rappeler à l'ordre par un garde. Il y avait une file à un mètre ou deux du guichet mais dans le brouhaha je ne l'avais pas remarquée. Il faut attendre un signe du garde pour pouvoir avancer. Le change est officiel et le même dans toute l'île. Aucun risque de se faire arnaquer.
Ensuite c'est le taxi pour aller au centre ville. Là aussi il y a les compagnies officielles avec un prix fixe décidé au départ (sans risque à deux ou trois Euros près...) et les autres .....(prudence !).
La fatigue et l'arrivée nocturne ne nous empêchent pas d'avoir un premier contact émerveillé avec l'ambiance nonchalante, la végétation tropicale et la musique omniprésente.

Vue de la fenêtre de l'hôtel Valencia
A la réception de l'hôtel nous sommes accueillis courtoisement mais sans servilité.
Nous découvrons notre chambre de style colonial un peu désuet mais confortable.La pression de l'eau dans la douche est un peu rikiki mais ça fonctionne.

Après une bonne nuit bien méritée nous découvrons les lieux.
La galerie
Le patio
                                 http://www.habaguanexhotels.com/fr/hotels/hostalvalencia.asp

Même si son petit-déjeûner n'a rien d'extraordinaire il y règne une atmosphère feutrée dans une végétation luxuriante. Parfois un petit groupe de musiciens vient faire résonner ces vieux murs au sons d'une salsa. Nous ne regrettons pas ce choix.

De jour les rues s'animent...
Une de nos premières rencontre sur la plaza San Francisco à deux pas de l'hôtel. 

Serait-ce Diego Velázquez de Cuéllar (1465-1524) le fondateur puis gouverneur de la Havane. (http://fr.wikipedia.org/wiki/Diego_Velázquez_de_Cuéllar)
En tout cas sa barbe semble porter bonheur. On l'a vue être caressée par une fillette de passage comme l'est le bras de la statue de 't Serclaes à Bruxelles.
Une tradition remontant à l'entre-deux-guerres affirme que si l'on forme un vœu en frottant le bras du gisant, il sera exaucé. Les millions de caresses érodent le métal et l'œuvre a dû être plusieurs fois restaurée : tout récemment en 2008.


Dans le jardin du couvent attenant à la jolie église dédiée à Saint François d'Assise se niche une petite chapelle orthodoxe et ses fonds baptismaux.
Plaza de San Francisco
La chapelle orthodoxe





Au cours de ces trois jours passés dans la capitale cubaine nous avons pu nous émerveiller devant quelques monuments réputés comme la cathédrale San Cristobal, le Capitole (copie conforme de celui de Washington USA) , nous avons vu de splendides demeures coloniales aux portails majestueux et aux patios à la végétation luxuriante. Un gros effort est mis sur la restauration comme sur la vieille place (Plaza Vieja) mais les maisons vétustes et parfois délabrées sont encore nombreuses.
Cathédrale San Cristobal

Une restauration serait nécessaire ....

Travaux en cours mais c'est la pause ...
Plaza Viega... Entièrement restaurée


Au gré de nos promenades les rues nous ont offert des tableaux vivants et colorés. Nous avons croisé une foule sympathique,  souvent souriante et prompte à faire la fête.  Jamais nous n'avons ressenti un sentiment d'insécurité même dans des quartiers écartés des lieux touristiques.



Futur virtuose ?
Futur champion !

Plaza de Armas...foire aux livres.

Farandole spontanée avec des acteurs de rue.
Avec une actrice de rue "officielle".
Partie de dominos.
Dans une taverne sur Obispo.
Et bien sûr les incontournables "américaines". Certaines rafistolées et branlantes, d'autres magnifiquement restaurées.

Nous quittons la Havane par le fameux "Malecon" que nous nous sommes promis de parcourir si un jour nous revenons à Cuba.

Pour la suite du voyage nous louons une voiture . Attention au budjet !!! (environ 100 Euros par jour). Bien sûr nous l'avions choisie confortable.

La veille du départ nous avons été contacté par une représentante de l'agence "Nouvelles Frontières" nous informant que la réservation de l'hôtel suivant posait problème. Elle nous a proposé comme seule solution possible de loger chez l'habitant en "casa particular". Cela nous a réjoui car c'était ce que nous souhaitions mais qui nous avait été déconseillé.

En route donc pour Viñales , zone tropicale dans le nord-ouest du pays. Première constatation, les poteaux indicateurs sont aussi nombreux que les cheveux sur la tête d'un chauve. Nous nous arrêtons donc plusieurs fois pour demander où trouver la "autopista 1", une des cinq autoroutes sillonnant le pays. Nous trouvons enfin cette grande artère à six voies (2x3) dont la bande de droite est encombrée de piétons, de charrettes, de cyclistes (souvent à contre sens) et truffée de nids de poules (parfois d'autruche) et dont l'asphalte gondole dangereusement. Cependant, curieusement, les accidents sont très rares. Ce n'est pas parce que la vitesse est limitée à 100km/h mais surtout parce qu'il y a très peu de trafic et les conducteurs sont prudents (par la force des choses !).
Autre caractéristique: les auto-stoppeurs. A la sortie de chaque ville ou village, sous chaque pont enjambant la route ils et elles sont des dizaines à attendre (parfois pendant des heures) le bon vouloir d'un chauffeur. Bien sûr quand on a de la chance c'est plus rapide, plus confortable que le bus et souvent gratuit. Certains auto-stoppeurs agitent un billet signalant qu'il sont prêts à payer l'équivalent du transport en bus. 
Malgré les nombreuses mises en garde nous avons décidé de nous arrêter pour rendre service. Nous ne l'avons jamais regretté.
Notre premier passager, Antonio, nous a remis sur la bonne route pour aller à Soroa réputée pour une cascade dans la forêt tropicale. Nous nous étions perdus sans savoir comment. 
C'est un étudiant en agronomie qui retourne dans sa province natale (à 80km) pour faire un stage dans une plantation de tabac. 
Midi approchant nous l'avons invité à partager un repas dans une gargote bien sympathique.
Ensuite il nous a servi de guide au cours de la promenade. En cette saison le niveau de l'eau était assez bas mais la nature sauvage valait le détour.

Après ça, pour nous remercier de l'avoir pris en stop il nous propose de visiter la plantation de tabac où il va travailler. Visite comme nous les aimons, authentique  et hors du circuit touristique. 

Séchoir à tabac
En route vers la plantation...

  




Un fumeur aurait certes mieux apprécié le cadeau mais il fallait au moins goûter le fameux cigare cubain.
Après ces pérégrinations nous déposons Antonio et sur ces indications nous arrivons sans emcombre à Viñales, bourgade aux pieds des "Mojotes"



Là nous sommes accueillis par une charmante hôtesse surnommée La China. Elle et son mari Marcelito sont propriétaires d'une "Casa particular", une chambre d'hôte. Elle est fière de pouvoir nous offrir une chambre indépendante de l'habitation ce qui n'est pas toujours le cas. Après cette longue journée nous sommes heureux de prendre une bonne douche et de nous détendre en sirotant un mojito. Ensuite nous dégusterons notre première langouste merveilleusement cuisinée "à la cubaine" par La China.
Une agréable détente
.
Le lendemain, après un petit déjeûner fleuri et copieux nous nous rendons sur les sentiers pierreux des mojotes.


Nous pouvons assister à des scènes de la vie quotidienne sans se sentir "touriste" en respectant le calme et la beauté d'une nature grandiose.




Après midi c'est en voiture que nous parcourons cette impressionnante vallée. Nous ne pouvions pas manquer l'incontournable (mais de mauvais goût) "Mur de la Préhistoire"





  



Le soir venu il faut déjà se quitter car La China ne pouvait nous dépanner que pour une nuit. Mais comme nous le constaterons tout au long de notre périple, les Cubains ne sont jamais à court de ressource et apparemment l'entraide y est largement pratiquée.

Il faut déjà se quitter.....

Nous passons donc la nuit suivante dans une autre charmante Casa appartenant à une voisine. Chez Alvares et Ada.On y retrouve la gentillesse, l'accueil et le sourire.
Casa Alby
Ensuite direction Cienfuegos. Puisque les réservations ont été faites depuis Bruxelles il nous faut bien nous contenter d'un hôtel de luxe.







A part quelques grandes maisons coloniales nous n'avons pas été attiré par cette ville.
Mais elle nous a servi de point de départ pour aller là où nous ne pouvions pas ne pas aller !!!
La ville du Che, là où la révolution a marqué un point important, j'ai nommé Santa Clara.

Le monument au train blindé
   



                Encore un petit resto cubain invisible de l'extérieur mais où nous nous sommes régalés.  

   Nous quittons à regret cette charmante ville pittoresque et palpitante de vie. Prochaine étape: Trinidad.
En route, comme tous les jours nous embarquons un auto-stoppeur. Après quelques kilomètres nous faisons connaissance. Il est pêcheur de langoustes à Cassilda (port de Trinidad). Il peut rester en apnée sous l'eau pendant 4 minutes. C'est Raoul. Comme chaque passager il nous apprend quantités de détails sur la vie de tous les jours.
Petit accident de parcours,une crevaison. Heureusement Raul, jeune homme costaud nous a prêté main forte pour changer la roue. J'avoue que seul j'aurais eu toutes les peines du monde car le cric n'était pas adapté à la voiture et la circulation est plutôt rare.

Réparation immédiate dans un petit atelier que Raul nous a déniché.

Arrivés à Trinidad nous déposons Raul à Cassilda où, dit-il, il a de la famille qui tient un paladare. Nous prenons rendez-vous pour le lendemain.
Port de Cassilda.


Ici aussi les réservations étant faites depuis Bruxelles nous nous retrouvons dans un hôtel du genre cage à touristes. Premier contact désagréable le responsable de l'accueil nous demande 20$ parce que nous arrivons vers midi, avant l'heure d'admission (14h)  de plus il veut nous obliger à porter un bracelet fluo indiquant que nous sommes bien clients de l'hôtel. Après quelques palabres nous payons les 20$ mais pas question de mettre le bracelet. Plus tard nous comprendrons les raisons de son insistance. En fait il s'agit d'un hôtel "all in" donc en arrivant avant l'heure d'admission nous profitions d'un repas de midi non compris dans notre réservation. Quant au bracelet il permet aux membres du personnel, principalement ceux qui s'occupent des bars et des restaurants de reconnaître les clients puisque tout est à volonté pendant le séjour. Nous avons très bien pu nous passer de cette formalité déplaisante pour nous.


C'est sympa même si ce n'est pas désintéressé.
Un des nombreux bars.
Puisqu'on y est profitons en....
A chaque arrivée d'un car de touristes, un petit pas de danse.
Même si ce n'est pas notre vision de la découverte d'un pays nous nous n'avons pas boudé notre plaisir. Surtout celui de se trouver à quelques mètres d'une magnifique plage caribéenne de sable blanc pas trop fréquentée. Je dirais même qu'à 6h30' du matin, mon heure préférée j'étais seul dans l'eau (enfin si on exclu ce charmant crabe).



Pendant notre séjour nous avons passé quelques heures à Sancti Spiritu sans en garder de souvenirs bien précis.
Sur la route vers Sancti Spiritu.
Comme partout des petits commerce et une foule bigarrée.
Par contre Trinidad ne nous a pas déçus. Ses rues et surtout leurs pavés...,son ambiance très bon-enfant, sa cathédrale, ses artisans, sa musique à tous les coins de rue, sa jeunesse pleine de vitalité etc.... Comme partout à Cuba le touriste est une source de revenus mais jamais nous n'avons été harcelés (ni ici ni ailleurs). Un sourire, un petit mot en Espagnol et vous pouvez vous promener en toute quiétude.








Après cette merveilleuse journée nous rentrons à l'hôtel où des animations battent leur plein mais nous préférons le calme de la chambre (très bien isolée du bruit) et des souvenirs plein le coeur.

Soyons honnêtes la dolce vita à l'hôtel n'était pas désagréable mais nous préférons de loin le contact direct avec la vie quotidienne des habitants. Aussi avons nous décidé de modifier notre dernière étape.
Nous avons repéré un itinéraire de retour vers La Havane puis à l'aide du "routard" nous avons cherché une Casa Particular sur la route. Nous avons réservé les nuits suivantes puis nous avons annulé la réservation dans l'hôtel de luxe prévu par l'agence.
Après ça, heureux de notre décision nous sommes retournés chez Raul et ses amis pour déguster une spécialité des pêcheurs de Trinidad. Il s'agit d'un gros poisson farci de crevettes et de langouste puis mijoté au four.




Un délice !


Après une dernière baignade dans cette merveilleuse mer des Caraïbes et une nuit de marmote nous reprenons la route en direction de Playa Larga.

Arrivés sur place après une route sans encombre les propriétaires de la chambre que nous avions réservée
nous apprennent que le locataire précédent est parti en mer à la pêche au gros et ils ne savent pas l'heure à laquelle il rentrera.
Qu'importe, à Cuba l'entraide n'est pas un vain mot et en moins de temps qu'il ne faut pour le dire ils nous ont trouvé un autre hébergement.
Nous irons donc chez Max et Magali.
Nous sommes reçus à bras ouverts et dès que la glace fut rompue le contact fut excellent tout comme les repas d'ailleurs. Magali est une excellente cuisinière et Max détient (jalousement)le secret d'une pâte à tartiner succulente.
Max est barman et travaille 24h. d'affilée puis a 2 jours de congé. Magali était institutrice maternelle mais maintenant se consacre uniquement à sa maison d'hôte.
Au programme de ces dernières journées nous avons choisi de visiter une reconstitution d'un village Taino ( occupants  précolombiens de l'île) dans la "laguna del tesoro" à Guamá ........
Arrivée en hors-bord à travers la forêt tropicale.



.... et"el criadero de los cocodrilos" Ferme d'élevage de crocodiles ayant pour but de repeupler les régions marécageuses de la réserve de Zapata.


De la naissance .....
..... à l'âge adulte.

Nous irons aussi nous baigner une dernière fois dans cette merveilleuse mer des Caraïbes. L'endroit regorge de poissons de toutes sortes. Emotion garantie même sans matériel de plongée.

Mais tout a une fin. Merci Max et Magali votre gentillesse, votre optimisme et les beaux moments que nous avons passés à bavarder de choses et d'autres nous ont permis de terminer notre voyage en beauté.

Dernier jour, nous repartons vers la Havane en emmenant Maheli (la fille de la maison) et son fiancé. Ce seront aussi nos derniers auto-stoppeurs. Route tranquille. Arrivés à La Havane nous nous réjouissons d'avoir pris les jeunes car ils nous ont guidés efficacement dans cette ville tentaculaire.


Un dernier excellent repas dans un palador et.......


..... adios Cuba. 

Un morceau de notre coeur reste sur l'île et si le monde n'était pas si vaste ...